dimanche 30 novembre 2008

Drôle de cadeau

Ici. maintenant. C'est là que ça se passe. Troisième porte à gauche. Entrez et laissez-vous porter. on vous a donné ce drôle de cadeau : la vie. Des yeux, oreilles, jambes, sexe pour jouir, cerveau pour inventer, imaginer, avoir peur : toutes cette fabrique à émotions !!
Cadeau monstrueux, trop gros, bien trop gros.
- Merci, c'est gentil mais je n'en veux pas. Ce n'est pas que je n'aime pas, mais je ne saurais pas quoi en faire. Donnez-le à quelqu'un d'autre. Je ne peux pas le refuser ? Enculés !!
Bon, nous y voilà. Alors...les premiers temps ça va. L'enfant. L'enfant innocent, inconscient. Le fou. Chance ? Malchance ? Atterri en catastrophe, l'appareil en flamme, dans une famille de tarés violents. Pourquoi est-ce que j'ai atterri là ? Qui a décidé du plan de vol ? Moi, vraiment ? Je suis masochiste dès le début. Merci. Ou bien, le super plongeon dans famille aimante, équilibrée, tout va bien, je ne peux pas rêver mieux. La tendresse, l'écoute, l'ouverture sur le monde, la conscience et le sens de la vie. Puis arrivent les questions, la conscience. Qu'est-ce que je fous là ? Ah enfin. J'y suis, c'est une plaisanterie ! Qu'est-ce que vous attendez de moi ?
Pas de réponse. Pas de clés. Merci. Le pas chanceux, il s'en fout, il s'est tellement fait foutre sur la gueule qu'il cherche tout un tas de gens à qui foutre sur la gueule. En général, ça l'occupe jusqu'à la mort (ouf !) Ou alors : résilience. Super ! Bienvenue dans le monde des gens qui vont bien. Bon je vais pas très bien quand même, mais j'en ai tellement chié que je kiffe un peu mieux là. Et l'autre le chanceux : tu fais quoi de ta vie ?
Heureusement, j'ai été conditionné. Essentiel le conditionnement. On m'a donné toutes les clés. Toutes. La vérité. Le sens. La direction. Mes parents aimant. Mes profs aimant et responsables. Mes petits camarades qui véhiculent le Message. La société toute entière s'y est mise. Avec le poids des siècles. Merci. merci beaucoup. Quelle chance j'ai ! C'est pour ton bien. Pour que tu saches où aller. Pour que tu n'aies pas à chercher dans toutes les directions. Ta vie entière, tu la vivras selon ces règles et ces lois. Lois de l'humanité. Lois religieuses. Lois morales. Mais rassure-toi petit vermisseau. Ta liberté est totale. A l'intérieur de ces cadres-pour-ton-bien.
Sauf si tu vis sous une dictature, mais là tu cherches. Et éventuellement, hors conditionnement, on peut imaginer autre chose ? Mais naturellement, petit vermisseau...mais tu seras rejeté, considéré comme fou ou asocial ou râleur. Mais si tu es très intelligent et très révolté, tu pourras impulser un mouvement révolutionnaire qui, s'il est synchrone avec un mouvement historique et social sous-jacent, fera de toi un visionnaire génial et te permettra de rentrer dans le rang et de fixer de nouvelles règles pour dire à tes semblables que tu as trouvé la vérité et que tu vas leur en faire bénéficier.
Voilà. Donc maintenant tu sais ce que tu fous là !
Dans le détail : tu dois te nourrir, sinon tu meurs : pyramide de Maslow, etc.... Après tu vas exercer un métier. Au choix : tu alimentes la Machine à produire. Ton talent sera utilisé au service de la Machine. Production. Consommation. Production. Consommation... Mais attention, nous ne sommes plus dans la satisfaction des besoins. Nous sommes dans la concurrence et la compétition. Il faut être meilleurs. Pourquoi ? Parce que sinon, on coule. Et le but ? Il n'y a pas de but. Et puis ça ne sert pas à grand-chose de se poser la question. Tu cherches à foutre la merde ou quoi ? Tu prends ton fric et tu fermes ta gueule d'accord. C'est comme ça que ça marche. Ok, donc je fais un truc où je suis content que mon talent soit utilisé au service de la Machine. Je gagne de l'argent pour satisfaire mes besoins personnels et pour le Plaisir qui me permet de tenir jusqu'à la mort. Cool. De toutes façons, même si je me pose des questions, c'est comme ça, c'est pas autrement et je ne peux rien faire contre.
Mais si, il y a ceux qui s'engagent. Ceux qui enseignent pour permettre de faire de petits soldats de la Machine bien dociles. Il y a ceux qui réfléchissent sur la Machine et disent : ça pue tout ça. ceux qui soignent les soldats de la Machine. Ceux qui soignent les récalcitrants : ceux qui ne veulent pas comprendre que c'est comme ça et pas important, il faut être raisonnable voyons, et se demandent parfois quand ils n'arrivent pas à dormir la nuit si ils ont raison d'avoir suivi ce système-là.
De toutes façons, l'espoir de la mort rassure tout le monde. Il arrivera bien le temps où je serai délivré de cette question insupportable : qu'est-ce que je fous là ?
Et si jamais je remets en cause le Conditionnement : qu'est-ce que j'ai envie de vivre chaque jour ? Dans quel monde ? Qu'est-ce que je peux faire, moi misérable vermisseau, avec ma pauvre liberté, pour impulser autre chose, pour dire : je ne suis pas tout à fait d'accord avec ce système ? Peut-être simplement ça : dire je ne suis pas d'accord. Et si j'ai des enfants, leur dire : vous avez le droit de penser autrement ! Vous avez le droit de rêver tout haut. Vous avez le droit de tout imaginer ! On vous a fait le cadeau de la vie. Ne laissez pas le plus grand nombre vous le voler ! Ne vous laissez pas emporter par le Flot ! Vous êtes plus forts que vous ne l'imaginez...même si vous pensez être seuls.

samedi 29 novembre 2008

A rebours

Le sens contraire. Là où tout dérape. Là où ça commence à devenir intéressant.
C’est bien ça que j’ai envie de raconter.
Alors si je vous raconte une balle dans le ventre. Ça pisse le sang et ça ressemble à une mort dégueulasse, vous vous dites : chouettte. !
Mais ça c’est après, c’est plus tard. C’est quand je serai mort.
Y’avait plus à se demander pourquoi, y’avait plus à se triturer les méninges, à se dire : « c’est bien » ou « c’est pas ça ». Juste à se laisser glisser…dans des draps tout propres, tout blancs, immaculés de mon sang qui pissait.
Avant bien avant, j’étais moi aussi tout propre, avec tout ce qui fallait d’éléments positifs de vie, bagnole comprise. En route vers une existence bien remplie. Et croyez-moi, si il y a bien quelque chose de bandant, c’est de se dire à sa mort : « j’ai eu une vie bien remplie…une vie de con mais une vie bien remplie. » J’ai tout cassé. Je me suis cassé. Et là sur mon bithume, croyez-le ou pas, je bande.
C’était un dimanche, c’est toujours un dimanche, devant la télé. Ça parlait, j’écoutais pas. J’avais le bras de Muriel quelque part sur une partie de mon corps. Corentin dormait là-haut. Et demain lundi, j’avais une réunion à 10h30. Avant, j’irais à la machine à café, je prendrais un café au lait sucré mais pas trop, je parlerais avec Bruno qui me raconterait qu’il s’était pris la tête avec Emilie et que cette fois-ci il pensait vraiment que c’était la fin. J’irais jeter un coup d’œil sur le site de l’équipe voir ce que disait Angel Marcos de la prestation de Lyon. Et puis j’ouvrirais mon tableau Excel.
A la télé, ça parlait des élections, de ce qui est bon pour la France et les français. Il s’adressait « à tous les français ». Ouais, ce gars-là, il avait compris mes problèmes et il me tendait la main et il comptait sur moi pour relever la France avec tous les autres français présents devant leurs télés. Putain, on allait se relever les manches et on allait leur montrer aux autres pays à côté ce que c’était un pays, un vrai. Cool !
J’ai regardé Muriel. Ses petits seins sous sa chemise de nuit. Ça faisait un moment que je ne l’avais pas fait jouir. Ça faisait un moment qu’elle n’y mettait pas du sien. Un moment l’idée de la violer sur le canapé m’a traversé l’esprit mais j’étais trop fatigué.
Deux heures plus tard, j’allais me retrouver face à un flingue et crever.
Alors je me suis levé pour aller à la rencontre de mon destin. Mais où trouver un flingue pour arrêter tout ça dans le 18ème arrondissement ?
- où tu vas ?
- marcher.
- A cette heure ?
- Ouais.
- Mais pourquoi ?
- Parce que j’ai besoin.
- Y’a quelque chose qui va pas ?
« y’ a quelque chose qui ne va pas ? », c’est une question assez marrante. Mais je ne riais pas.
- non, tout va bien. J’ai juste envie d’aller marcher un peu.
- Tu rentres dans longtemps ?…parce que je sens que je vais t’attendre et ça va m’empêcher de dormir.
- Dans un quart d’heure, vingts minutes à tout casser.
Une heure après, elle allait appeler les flics.
40 minutes à s’inquiéter. Ça grimpe comme une petite contrariété : il est parti plus longtemps que prévu, je m’en doutais. Un peu plus tard, ça commence à démanger, on se met en colère pour ne pas reconnaître qu’on a peur : « quel salaud quand même, il sait bien que je l’attends. » et puis tout à coup, on passe de l’autre côté, il doit y avoir un moment précis pour ça, il faudrait calculer au bout de combien de temps : « il lui est arrivé quelque chose ». Et là, ça devient du délire, tout y passe : agression, accident, fugue (le moins grave), tout ça en images bien sûr.
Tu vois Muriel, à l’heure de crever là, avec toutes ces sirènes autour de moi, je repense à ton cul. T’as un putain de très beau cul. Et si y’a une chose que je regrette vraiment, c’est de ne pas t’avoir sodomisée. J’aurais pas eu le cran de te demander.
J’ai marché. J’ai cherché un regard de femme. Une vicieuse. Y’en a parfois. Je suis monté en haut du côté de Lamarck. Redescendu. Bu une bière chez Camille. Toujours pas de vicieuse.
J’ai vu la voiture des flics en face de moi. Et ça m’a pris. J’ai fait demi-tour et j’ai couru. Putain c’était bon de sentir mes jambes. J’ai couru comme dans un film comme si j’étais un criminel. J’ai pris les escaliers. Je me suis retrouvé devant le « rendez-vous des amis ». Une autre bagnole de flics attendait déjà. Les flics sont sortis quand ils m’ont vu. J’ai eu peur. Putain c’était bon. J’ai tourné à droite. Ils m’ont coursé. J’entendais leurs pas. Je m’attendais à sentir une balle dans mon dos. Comme quelqu’un qui te tape l’épaule pour que tu te retournes. Pourquoi ils disaient rien, un truc comme : « police, arrêtez ! » Rue André dell’sarte. Nouvelle bagnole de flics. Crissements de pneus. Est-ce que j’avais vraiment envie de mourir. Non pas vraiment. En tout cas pas précisément maintenant.
La première balle m’a tapé dans le ventre. Ils avaient dit « Police, arrêtez vous » eux ; mais je crois bien que je n’avais pas réagi. Je devais penser à autre chose. Ça fait très bizarre une balle dans le ventre. Quand je raconterai ça à Bruno. Ce qui se rapproche le plus je crois c’est un coup de batte de base ball qui te coupe le souffle.
La police a appelé Muriel et ils ont dit « on a retrouvé votre mari ». Elle a poussé un soupir de soulagement.


lundi 24 novembre 2008

Le bonheur c'est simple

Je suis heureuse. Oui, j’ose l’avouer sans peine. Je sais que ça en agace un certain nombre. Et parmi ce « certain nombre », je pense surtout à Céline, ma « meilleure amie ». Céline n’arrive pas à être heureuse. Est-ce que c’est ma faute ? Franchement ! Est-ce que j’y peux quelque chose ? Qu’est-ce qu’elle croit ? ça ne m’est pas tombé tout cru dans le bec ! Le bonheur, c’est comme une petite entreprise, ça se travaille. C’est trop facile de se lamenter. Il y a mille raisons de se lamenter. Il y a aussi mille raisons de se réjouir. Le matin, quand je me réveille, je fais un salut au soleil. Parfaitement. Je le remercie de nous donner sa lumière et sa chaleur. C’est Christophe, mon prof de yoga qui m’a enseigné ça. Depuis, ça a changé ma vie. On commence sa journée très différemment, c’est incroyable. Christophe me fait merveilleusement l’amour. Je crois que Céline s’en doute, raison pour laquelle elle est malade de jalousie. Mais ça aussi, je l’ai « gagné » ! Qu’est-ce qu’elle croit ? Je le voulais, je l’ai eu. Dans la vie, ça marche comme ça. Il faut vouloir. Mais vouloir vraiment. Et moi, je l’ai voulu, la première fois que je l’ai vu. Il est tellement zen. Si jeune (28 ans) et déjà tellement sage ! Il est très beau aussi ce qui ne gâche rien. Je voyais bien que Céline le reluquait, mais faut agir ma pauvre Céline. Faut agir.
Il a beau être incroyablement sage, c’est un homme. Et pour les hommes, je connais le manuel d’usage. Le cul. C’est peut-être vulgaire, mais j’ai suffisamment vécu pour savoir de quoi je parle. J’ai eu mon mari comme ça. Et ma promotion aussi. Attention j’ai pas fait la pute. Mais, on sait très bien comment ça marche. Tu fais attention à toi. Tu te maquilles. Tu te fais belle quoi ! Et tu passes devant les moches. C’est pas joli-joli, mais c’est comme ça. Faut connaître les règles du jeu, c’est tout.
Christophe, c’était pareil. J’ai des beaux seins. J’ose le dire. De toutes façons, c’est lui qui le dit : si on ne se fait pas de compliment à soi-même, qui nous en fera ? C’est le principe de l’estime personnelle. Comment tu veux aimer les autres si tu n’es pas capable de t’aimer toi-même. Donc, pour les séances de yoga, j’ai choisi un haut noir moulant qui met mes seins en valeur. Les trois premiers mois, je suis arrivé en avance, toujours la première. Il préparait les tapis. Je l’aidais. Et je me changeais devant lui, « en discutant ».
Je lui disais : je pourrais me changer dans les vestiaires, mais je préfère discuter avec toi, ça ne te dérange pas ? Faut toujours faire croire que tout ça est tout à fait normal. Je mettais mes plus beaux sous-vêtements. Et un jour, je n’ai pas mis de soutien-gorge. J’étais à un mètre de lui. On discutait. J’ai enlevé mon pull mohair rouge. Il m’a regardé. Il était troublé. Il regardait mes beaux seins lourds. Je n’ai plus bougé. Je l’ai regardé. Je lui ai pris la main très naturellement et je l’ai posée sur mon sein gauche. Voilà, c’est aussi simple que ça. Si t’osais, ma pauvre Céline, si seulement t’osais ! Il a fallu que je le calme tellement il était excité. C’était drôle de le voir faire son cours après. Il ne pouvait pas s’empêcher de me regarder. Il avait du mal à se concentrer. Il disait un peu n’importe quoi. Et moi je lui souriais de temps en temps. Je crois que Céline a tout de suite compris. Elle est raide dingue de lui. A la fin du cours, elle est partie tout de suite, sans dire au-revoir à personne. On a été prendre un pot au bar à côté comme d’habitude. Les filles ont fait comme d’habitude ; elles ont bu ses paroles. celles qui sont mariées pensaient : si mon mari avait ne serait-ce qu’un dixième de sa sensibilité, de sa douceur et de son intelligence, je serais heureuse ; et les autres auraient rêvé se retrouver à ma place. Mais, la vie, les filles, c’est un combat. Faut pas attendre, faut agir. Les filles sont parties. Moi aussi. Je sentais qu’il était tout chose. Il aurait aimé baiser. Je l’ai laissé frustré. Moi aussi j’étais frustrée. Quand je suis rentré, Denis, mon mari, regardait la télé. Je me suis caressée dans la salle de bain en imaginant Christophe en train de me faire l’amour sur un tapis bleu dans la salle. Et pour m’aider à jouir, j’ai imaginé Céline en train de nous regarder en pleurant. Ça m’a excitée et ça m’a fait partir tout de suite. Evidemment, j’avais un texto : « je me sens comme le premier homme à avoir posé le pied sur la lune : émerveillé, heureux, un peu effrayé aussi… »
Je connais les hommes. Je sais qu’il ne faut pas leur donner trop vite ce qu’ils cherchent, sinon ils nous méprisent. Ils sont romantiques pour pouvoir mieux te baiser mon enfant.
Lui, je le voulais vraiment. Je voulais qu’il tombe amoureux de moi, pour longtemps.
Je ne lui ai pas répondu.
Le lendemain, j’ai eu un deuxième texto : « ça va ? ».
Je lui ai répondu : « je crois que tout ça va trop vite pour moi ! »
Si tu veux du cul avec un homme, c’est trop facile. Si tu veux qu’un homme tombe amoureux de toi, c’est facile aussi. Mais il ne faut pas être impatiente. C’est en général ce qui perd la plupart des femmes. Elles projettent sur l’homme ce qu’elles sont elles-mêmes. Elles pensent : puisque moi je l’aime, que je suis transparente comme de l’eau de roche, puisque j’éprouve ce sentiment merveilleux et absolu, pourquoi ne nous n’y abandonnerions pas, tout simplement. Sauf qu’une femme, quand elle commence à éprouver des sentiments pour un homme et qu’elle fait l’amour avec lui, en général, son amour grandit. Alors que l’homme, c’est le contraire. Il est soulagé au niveau de ses hormones. Et là, il commence à relativiser grandement son intérêt initial pour nous.
Donc, je l’ai calmé très vite. Pas de nouvelles jusqu’au jeudi suivant. Je ne suis pas arrivé en avance comme d’habitude. Il était distant. Il ne savait plus comment se situer. Exactement ce que je voulais. Après le pot, quand les filles sont parties, je suis partie aussi et je lui ai envoyé un texto de ma voiture à l’arrêt : « tu es où ? »
Il a accouru ; nous nous sommes embrassés dans ma voiture comme seuls les amants savent le faire. Il était excité proportionnellement à sa frustration de toute la semaine. On s’est mangé la bouche. On n’en pouvait plus de se toucher. Ses mains, fines et douces, presque des mains de femme me malaxaient les seins sous mon chemisier blanc et partout où elles pouvaient : mon cou, mes jambes, mes joues, mon ventre. Moi aussi, je le caressais partout et je lui serrais sa bite dure à exploser sous son pantalon de toile. Il a voulu sortir son sexe. J’ai dit non. Il a dit oui tu as raison. Ça a duré une heure environ, où nous étions constamment dans cette tension insoutenable où le corps hurle d’être soulagé.
Ensuite nous avons discuté. Nous nous tenions les deux mains. Parfois on se refaisait un baiser dans le cou. Il m’a dit qu’il me trouvait tellement belle. Je lui ai dit : je vis un rêve. Nous avons parlé de lui : qu’en fait il était plus fragile qu’il en avait l’air. Que c’était sans doute pour ça qu’il s’était dirigé vers le yoga. Que ça lui avait fait du bien. Qu’il se sentait plus fort maintenant. Les hommes tombent amoureux quand on leur refuse ce qu’ils veulent (mais pas trop) et quand ils nous parlent d’eux. Ils croient qu’ils nous aiment, alors qu’en fait, c’est souvent eux qu’ils aiment, à travers notre manière de les écouter.
J’ai dit : je dois partir, sors vite, sinon on n’y arrivera pas. On s’est embrassé de nouveau. Plus calmement, longuement, « amoureusement ». Nos bouches ont eu du mal à se décoller. Puis nos mains. Il a refermé la portière en me faisant un baiser avec la main. Je lui ai rendu. En rentrant, mon mari m’attendait.
- pourquoi tu rentres si tard ?
- Le pot s’est prolongé plus tard que prévu. En fait, je suis restée à discuter avec Christophe. J’ai pas vu l’heure. J’aurais dû te prévenir, je suis désolée.
- C’est pas grave…c’est juste que je me suis un peu inquiété.
- Un texto, c’est pas long, j’aurais vraiment pu le faire. On était pris dans une discussion tellement passionnée que je n’y ai pas pensé. Je suis désolée vraiment.

Il faut toujours mentir en se rapprochant le plus possible de la vérité. J’aurais même pu aller jusqu’à dire sur le ton de l’humour : « j’ai couché avec Christophe ». Un peu dangereux, mais redoutable si ça passe. On devient insoupçonnable après.
Je ne veux pas d’histoire avec Denis. Je ne suis plus amoureuse de lui. Normal après 14 ans de vie commune et trois enfants. Mais il est solide, gentil et j’aime ce cadre familial sécurisant. C’est un très bon père. Et j’adore la petite vie de famille que nous avons su créer. Les enfants sont heureux. Tout le monde est heureux. Pourquoi casser ça ? ça serait ridicule !
Je n’aime plus trop faire l’amour avec lui. Il me baise par nécessité. Et je ne lui demande pas de prendre la peine de me caresser ou d’être un peu plus tendre. Je ne suis pas sûre d’en avoir envie. Je fais mon devoir conjugal avec grâce. Parfois j’imagine que je suis une prostituée et qu’il m’a payée. Ce qui est un peu vrai puisque je profite grassement de son « excellente situation ». Mais je n’ai aucune sorte de scrupule. C’est un contrat gagnant/gagnant et nous en sommes tous les deux parfaitement conscients.
J’ai attendu trois mois avant de coucher avec Christophe. Nous jouions à touche-pipi dans ma voiture : nos petits rendez-vous « au bord de l’insoutenable ». Une fois je l’ai soulagé. Il s’est éjaculé dessus très élégamment pour ne pas laisser de traces compromettantes dans la voiture. J’imagine en effet Denis en train d’essuyer le pare-brise pour tenter d’enlever « la buée »…
Pour Denis, l’explication de mes prolongements de séances étaient : on a décidé de carrément dîner au resto après le yoga ; c’est vrai on s’est toutes aperçues qu’on étaient affamées après le yoga et qu’on grignotait dans le frigidaire comme des idiotes ! J’ai arraché quelques serments à Christophe. Je lui disais : je ne voudrais pas que tu abuses de moi. Tu sais que je ne joue pas. Je t’aime vraiment. Il jurait ses grands dieux que oui, il m’aimait lui aussi, par-dessus tout. Il n’était pas comme les autres hommes !
Je l’ai quitté juste avant qu’on ne fasse l’amour. Je lui ai dit : j’ai trop peur que tu m’abandonnes, que tu te lasses de moi. J’ai attendu deux semaines. Il est venu en bas de chez moi. Il avait bu. Il m’a fait une très belle déclaration. Dans la rue, j’ai dit : tu es fou de venir comme çà et moi je suis folle, je suis folle de te croire et je l’ai embrassé. Nous avons fait l’amour dans le hall de mon immeuble. Il a relevé ma jupe, écarté mon string. J’ai joui très fort.
Ça fait 3 ans que je vis mon histoire avec Christophe. Il me fait merveilleusement l’amour et il me parle de mille choses intéressantes comme de la sauvegarde de la planète. Il est très concerné. On trouve nos petites plages régulières. Suffisamment. Pas trop. Denis se doute de quelque chose bien sûr mais comme il a horreur comme moi de déranger son quotidien et encore plus des crises, je suis tranquille de ce côté.
Christophe regrette de m’avoir fait tous ces serments évidemment. Il se sent coincé. Mais il a bien trop de principes moraux pour faire marche arrière. Et je le fais très bien jouir.
Je suis heureuse et je compte bien le rester. Par tous les moyens !


samedi 22 novembre 2008

Le bonheur enfin

Marine se retourna et sa main rencontra un corps chaud. Elle sourit. Antoine. Marine était amoureuse et Antoine dormait. Elle effleura sa joue. Elle trouvait charmant cette façon qu'il avait de dormir la bouche écrasée sur le drap en une grimace affreuse et légèrement bavante. Marine aimait et était aimée. Elle laissa son esprit imaginer d'autres matins comme celui-là. Elle vit même un enfant tout à coup accourir et se blottir entre eux deux en riant. Leur enfant. Peut-être y en aurait-il deux d'ailleurs...ou davantage. Une fille et un garçon...deux garçons et une fille ? Elle se donna une tape mentalement. Il n'était pas temps de penser à ça. Quelle sotte elle faisait. Elle n'avait donc pas retenu les leçons du passé...cette fois-ci pourtant c'était différent. Il ne lui aurait jamais dit « mon amour » sinon. Il ne lui aurait jamais offert cette bague qui devait valoir une fortune. 1000, 1500 euros. Peut-être davantage. Sertie de diamants. C'était presque une bague de fiançailles. Elle contempla son homme à elle, l'homme de sa vie. Eh oui, elle osait le dire, le clamer même. Il était l'homme de sa vie. Jamais elle ne le quitterait. Son bonheur nouveau l'étouffait.
Antoine se réveilla doucement et Marine le regardait comme une mère son nouveau-né.
- Salut
- Salut répondit-elle.
- Quelle heure est-il ?
- 9 heures.
- 9 heures, il est tôt. Tu ne dors pas.
- Je te regardais.

Antoine l'embrassa tendrement. Si tendrement. Si différemment des autres hommes. Lui ne la trahirait pas. De cela, elle était certaine. A sa façon de la serrer dans ses bras, elle savait que qu'il ne partirait pas. Elle ferma les yeux et s'abandonna. Plus jamais elle n'aurait besoin de ces jeux de séduction épuisants. Et pourtant c'est ainsi qu'elle l'avait eu lui aussi. Avec son décolleté et ses talons aiguilles. Avec son air de Messaline. Elle aimait bien jouer à la pute un peu. Mais lui avait compris qui elle était vraiment derrière tout ça. Pour lui, elle pourrait s'habiller en bonne soeur. C'était tellement dérisoire tout ça en regard de tout l'amour qu'elle sentait monter pour lui. Des réserves d'amour qu'elle avait accumulé toutes ces années durant. Rien que pour lui. Parce que les autres n'en avaient pas voulu. Parce que les autres ne le méritaient pas. Cet amour, il avait crû, il s'était multiplié, il commençait à couler doucement. Pas trop, pas trop vite. Elle ne voulait pas l'effrayer. Mais c'est bientôt un fleuve qui se déverserait. Elle avait tant à lui donner. Sa vie pour commencer. Antoine. Antoine. Antoine ! Quel nom magique ! Elle le rendrait heureux. Elle lui permettrait de s'accomplir.
Elle le regarda se lever. Il avait les fesses un peu tombantes et une petite bedaine. Elle trouvait ça mignon...touchant. Son gros bébé. Il s'habilla. Se retourna tout en enfilant son pantalon. Lui sourit. Elle eut soudain envie de sauter hors du lit dans ses bras. Il ne fallait pas qu'elle l'étouffe. Non, juste le regarder, savourer sa beauté, ses yeux francs et rieurs. Comment des yeux comme ça pourraient-ils jamais la trahir ? Impossible. Il n'était pas beau pourtant. Pas au sens académique du terme. Mais derrière ce visage un peu flasque, un peu trop rond, un peu trop rouge, derrière cette calvitie, elle voyait son coeur et ce coeur était le plus beau qu'elle ait jamais rencontré.
 - je vais devoir y aller. Je vais être en retard sinon.
 - Oui mon coeur. Alors à ce soir ?
- A ce soir.
 - Un baiser ! Dit-elle en tendant les lèvres avec gourmandise et bonheur.
Quand ses lèvres se posèrent sur les siennes, tout son corps s'électrisa. Elle pensa à la Belle au bois dormant. Elle pensa : je suis la belle au bois dormant. Mon prince charmant vient de me réveiller d'un long sommeil. Enfin, je vais vivre.
Elle l'attendit toute la nuit, et toute la journée suivante et encore une nuit. Puis elle ouvrit la fenêtre. Il faisait un peu froid. Une brise d'automne. Du 6ème étage de son immeuble, elle ne se louperait pas. Elle enjamba la barre en fer et sauta.

Des noeuds dans la tête

vendredi 21 novembre 2008

Aïe


Exercice d'indécence exposé en pâture : putain, j'ai mal ! Original !!
Je reprends le "je". C'est le moi-moi qui parle. Enfin, je crois. Et que dit le "moi" ?
Il dit Fuck !
Je ne savais même pas que ça existait.
Le mal de nos sociétés : le fameux mal-être.
Je me lève. ça va. Je prépare mon petit-déjeuner : ça va.
Affaires courantes : on zappe.
Affaires urgentes : plus tard.
Le travail ? ça a l'air d'aller.
Pour le moment.
Il est 11 heures. Les moteurs semblent fonctionner. Alléluia !
Ma semaine passée était donc seulement un méchant passage à vide et ces derniers mois une passerelle un peu douloureuse vers un Mieux.

L'enthousiasme semble en état de fonctionner. Le niveau d'énergie est élevé. Le travail se fait.
Bien. Très bien.
Il est 12h30. Que se passe-t'il ? Une petite baisse de régime. Rien de grave. Allez, on s'accroche. On laisse passer le nuage.
12h45 : Panne sèche.
Manger.

Horreur. Reconnaissance des symptômes.
Merde !
Apathie. Douleur.
Il reste les deux mamelles : alcool ou médicaments. Pas envie. Merde !
Alcool un peu. Pansement qui éloigne un peu l'angoisse.
Muscles tendus dans le dos. Difficulté à respirer. Fatigue. Goût de vivre en chute libre. Passer les heures maintenant.
Tenir.
Faire semblant. Ne pas faire peser aux autres. Mais je ne suis pas là.
Bordel. Je suis où ? Personne pour répondre. Evidemment.

J'en chie. Le temps passe. Je le regarde. Il me regarde.
Attente. Comme une insomnie en plein jour.

Presque envie que quelque chose explose. Sensation d'être au bord.
Mais au bord de quoi ?

mercredi 19 novembre 2008

New Day

Une journée s'est réveillée
belle dans sa rosée
attendant d'être remplie
alanguie
La voilà souillée
à force d'être gâchée
Eh quoi vous ne savez donc pas aimer ?

dimanche 16 novembre 2008

Vox Dei

Tout le monde l'aimait. Tout le monde. Tout le monde, ça faisait les 17 personnes qui habitaient le hameau. Elle était heureuse. C'était un truc qu'on comprenait pas nous. Heureuse ! ça n'existait pas chez nous. Fallait l'entendre chanter. Elle se levait et elle chantait. Elle avait les mains dans la terre. Le gris du ciel sur la tête et le froid qui mange les articulations. C'était un tout petit filet dans le silence tout sombre de nos vies enfouies dans les années trop dures. Un air tout doux. Une ritournelle qu'on connaissait tous. Une histoire de prince à la con sur un cheval, et la villageoise qu'est tellement belle et lui il tombe raide comme un idiot alors qu'il la connaît pas. C'est une histoire d'un con ! Après, elle l'envoie chier et elle a bien raison. Il ressemble à rien ce prince. Et elle finit engrossée par un berger. Elle a 9 enfants et la chanson dit qu'elle est contente, parce que le berger est un brave gars. Et le prince se jette d'une falaise par désespoir. Je ne sais pas qui a écrit cette ritournelle, mais dans le genre débile, tu peux pas faire mieux. N'empêche que tous les matins, on l'écoutait cette putain de chanson à la con. Y'avait Yorik, le grand Yorik avec sa barbe noire comme un troupeau d'arraignées. Jamais un sourire. A cogner les arbres autant qu'il cognait sa femme. Quand il entendait la voix d'Anaïn, il était comme désarticulé. Comme si sa voix lui avait cassé le bras tout à coup et il ne souriait pas non, faut pas déconner non plus. Mais sa barbe elle ressemblait plus à des araignées mais à une barbe normale et son air d'assassin, ben, il avait disparu. Oh il revenait après, mais le temps de la chanson, ben PFFUIT plus rien. Et c'était pareil pour tout le monde. Yelena, la toute courbée jusqu'au sol, elle se redressait d'un ou deux centimètres. Pour vous, ça a l'air rien, mais pour elle, putain, c'était une montagne à soulever avec son dos. Les gosses arrêtaient de se battre. Les couples arrêtaient de se disputer. Tout le monde l'écoutait. Sa voix était toute pure, toute transparente comme la source de la Borgnole en haut, au niveau de la crête ; elle emplissait l'air. On la buvait pareil que l'eau de la source sa voix. Elle semblait repousser tout le noir qui s'est accumulé dans la vallée depuis personne ne sait quand. Les parents d'Anaïn, Horg et Maïnea, ils étaient presque désolés ; c'était comme s'ils s'excusaient d'avoir une fille comme ça, qu'il leur ressemblaient aussi peu.
Et puis Yorik il a voulu la toucher. La toucher pour avoir un peu d'elle en lui sans doute. Il l'a touchée avec ses grands bras d'assassin. Et c'était comme si toutes les araignées sur le visage de Yorik étaient venues manger le visage d'Anaïn. Elle a crié très fort. Et puis elle a plus rien dit. Et puis elle a plus chanté. Et puis elle a plus rien dit du tout même...jamais. Et dans ses yeux il y avait la même absence de lueur que dans nos yeux à nous, les 17 habitants du hameau. Et Horg et Maïnea, les parents d'Anaïn, ils étaient presque soulagés.

samedi 15 novembre 2008

mercredi 12 novembre 2008

Bruits de couloir

Là où je travaille, il y a monsieur le directeur. Pressé. l'air occupé. Préoccupé même.
- Monsieur le directeur ! Monsieur le directeur !
- Je n'ai pas le temps.
Vous n'avez jamais le temps monsieur le directeur. C'est pour ça que vous êtes directeur, hein monsieur le directeur ? Pas le temps non plus pour Edouard et Emilie, vos deux charmants enfants qui sont sur le bureau en photo. Emilie va chez les meilleurs médecins : il faut être patient, vous savez l'anorexie est une maladie très complexe !
Est-ce que Emilie est morte monsieur le directeur...ou pas encore ?

Mais Edouard donne entière satisfaction. Figurez-vous qu'il apprend le chinois. Absolument. Ce qui n'est pas une mauvaise idée par les temps qui courent me direz-vous ! AH AH AH !

Et Elizabeth, votre charmante épouse. Elle a la peau blanche et les cheveux si noirs très lisses. Elle n'est pas belle, non, c'est un bien trop petit adjectif pour la définir. Elizabeth n'est pas ravissante non plus. Elle n'est pas angélique. Elle est bellangévissante ! Oui, c'est ça. Elle est venue l'autre jour, elle ne m'a pas vu. Et moi, je l'ai regardée. Elle ressemblait à la statue que j'avais vue en photo dans un magazine chez le dentiste : La Pièta de Michel Ange. Elle cherchait Pierre, notre directeur marketing. Parce que Pierre et elle font l'amour dans le bureau d'Elizabeth juste à côté du mien. Oh très discrètement. Ils étouffent leurs soupirs. Et parfois Elizabeth dit : Chut Pierre, je t'en prie. Oh Pierre ! L'autre jour, Pierre se lavait les mains, il était un peu rouge. Je suis sorti des toilettes. Il m'a dit : Ah Minguet ! J'ai un papier pour vous. Tout le monde a des papiers pour moi. Pierre ressemble à Cary Grant. Il est classe. Tout les filles dans l'entreprise voudrait sortir avec Pierre. Les mariées et les pas mariées, sauf Georgette, parce que, depuis le temps et avec tout ses malheurs, elle a effacé de sa tête cette idée ; elle préfère Félix son chat maintenant : "ils valent mieux que bien des humains". Elizabeth vient souvent dans l'entreprise. Comme elle s'ennuie chez elle, monsieur le directeur lui a dit : avec ta licence de psychologie, tu pourrais être très utile à l'entreprise tu sais. Tout le monde a besoin de parler. Tu aurais un bureau ! Pourquoi pas ? Personne ne vient la voir parce que c'est la femme de monsieur le directeur. On va quand même pas lui parler ! Un jour, elle a chopé Pierre.
Vous ne voulez pas parler ? Il a dit oui, pourquoi pas. Elle est tellement bellangévissante ! Alors elle lui a tout raconté, qu'il la touchait plus. Qu'il était tout le temps occupé et que si Emilie était malade, elle savait bien pourquoi elle ! Et elle pleurait. Et il disait tout le temps : je comprends, je comprends. Et après ils n'ont plus parlé du tout. Et après, elle disait : Pierre. Oh Pierre !
Pierre il était content que toutes les femmes aient envie d'être avec lui. Il avait l'impression d'être encore plus beau. Il marchait droit et énergiquement dans le couloir, avec un sourire pas trop grand mais assez pour vouloir dire : je suis un homme qui réussit ; je suis un peu au-dessus du lot. Myriam, à la compta, ça lui plaisait drôlement ça ! A chaque fois qu'elle le croisait dans le couloir, et elle s'arrangeait pour que ça arrive souvent, elle le regardait avec un grand sourire et respirait un peu plus fort que d'habitude. Et Pierre disait : "Oh Myriam, toi, tu sais qu'il faut que t'arrêtes de me regarder comme ça !" "comment je te regarde ?" tu le sais très bien...espèce de coquine !" Et Myriam, elle gloussait, exactement comme une poule, en retenant son rire dans sa gorge. Elle continuait dans le couloir et Pierre regardait son cul. A David du deuxième, il disait : elle est trop bien roulée, c'est pas possible, il faut que je me le fasse. Elle, c'est une vraie salope, c'est moi qui te le dis ! Une vraie de vraie !
Myriam, elle a pas dit : Pierre ! Oh Pierre ! quand ils ont fait l'amour. Mais : vas-y prends-moi bien ! Oui, vas-y, c'est ça ! Tu me baises bien !
Monsieur le directeur a su pour Pierre et Elizabeth. C'est Josy qui a parlé. Elle en pouvait plus. Merde sous ses yeux ! C'est pas possible. Faut que quelqu'un lui dise. Cette pimbêche !
Il a dit : Pierre, comment t'as pu ? Comment t'as pu me faire ça ? J'te faisais confiance ! Je fais comment moi ? T'as une solution toi ? Maintenant tout le monde est au courant, je passe pour quoi ?
Eux ils disaient rien.
J'ai pas envie de te virer moi. Et on mettrait quoi comme motif : me fait cocu avec ma femme ? Ah j'ai l'air malin.
Il parlait sans être trop énervé.
Bon on va trouver une solution. Il faut laisser passer l'orage, c'est tout ! on va trouver, ne t'inquiète pas. On s'en est toujours sortis tous les deux non ?
Oui il a dit Pierre. Et Elizabeth elle a dit : Et à moi tu ne dis rien ?
Moi j'aurais bien été lui parler à Elizabeth. J'aurais peut-être dû. Mais je n'osais pas.
Pour lui dire qu'elle aurait pas dû venir dans cette vie. Que moi je la comprenais. Et qu'elle était bellangévissante comme la Pièta. Qu'elle avait dû s'égarer par erreur ici, qu'il y avait sûrement un espace temps où l'accueillir quelque part et où tout le monde l'aurait respectée à sa juste valeur. Mais moi j'étais juste Minguet, Minguet pour qui on a un papier...
Elizabeth, elle est partie en "arrêt maladie" pour laisser reposer les choses, tu comprends, le temps que ça se tasse.
Mais elle l'avait trop dans la peau son Pierre. Un jour elle est revenue et elle a vu Pierre dans son bureau qui "baisait bien" Myriam. Alors elle est partie et dans sa lettre, elle a marqué : "je me suis trompée toute ma vie."




mardi 11 novembre 2008

Armistice





La guerre se pavane
Dans ses beaux habits rouge
Rouge, rouge et puis s'en vont
La guerre rougit pivoine
Elle a un peu honte

Crisis

Une bulle belle
se ballade bégueule
se croit d'acier
éclate et se tait

lundi 10 novembre 2008

Nouvelles fraîches

La Vérité

Paul mangeait des grenouilles et des papillons.
Il était grand comme un toboggan et fort comme une pelleteuse.
Paul mangeait des grenouilles.
Paul cherchait au fond des bois la Vérité.
Mais elle lui glissait entre les mains comme les grenouilles quand il les chassait.
Il avait un grand chapeau jaune à large bords et des bottes de la même couleur.
Il y avait toujours un sourire sur son visage et des idées dans sa tête.
Il chantait à tue tête et les voisins disaient : « qui c'est qui fait chier comme ça ? »
C'était Paul qui faisait chier !
Paul ne le savait pas. S'il l 'avait su, il aurait arrêté de chanter à tue-tête parce que Paul ne voulait pas faire « chier ».
Paul cherchait la Vérité. C'était Maurice, le tout alcoolisé du bar tabac qui lui avait dit : « tu vois petit, l'important dans la vie c'est de trouver sa vérité ! » Il trouvait que Maurice exagérait de l'appeler mon petit alors qu'il était grand comme un toboggan.
 C'est quoi la Vérité ?
 Cherche petit, cherche, sans te lasser et je te jure que tu la trouveras.
Alors, depuis, Paul cherchait la Vérité. C'était un peu compliqué parce qu'il ne savait pas à quoi elle ressemblait. Il s'était dit dans sa petite tête plein d'idées : quand je rencontrerai quelque chose et que je ne saurai pas ce que c'est, c'est que ce sera la Vérité !
En attendant, il chassait les grenouilles. Il les trouvait surtout au bord de l'étang. Il était devenu très fort pour prendre les grenouilles. Il voyait leur petit museau percer le cresson et hop, d'une main large et vive il les attrapait dans une gerbe de cresson qui éclaboussait un peu sa chemise blanche.
D'ailleurs, sa chemise était toute mouchetée de vert.
Bien sûr il oubliait de temps en temps de chercher la Vérité parce que c'était un peu fatigant de chercher quelque chose qu'on ne connaissait pas.
Ce qu'il aimait le plus chanter c'était Claude François : « Le téléphone pleure » surtout, il faisait très bien la petite fille. Il aimait bien cette chanson. Ça lui donnait un peu envie de pleurer.
Les grenouilles, il les faisait cuire dans la petite clairière à côté de la grande pente en terre. En ce moment, il y avait des primevères partout. Des tapis mauves, jaunes ou blancs. Lui, il préférait les mauves. Parfois, il faisait des bouquets qu'il offrait aux gens du village quand il revenait se coucher le soir chez sa maman. Des fois, on lui répondait : j'ai pas le temps et il ne comprenait pas bien. Comment on pouvait ne pas avoir le temps de prendre un bouquet de fleurs. Mais il y avait beaucoup de choses qu'il ne comprenait pas bien. Alors son sourire s'éteignait comme on éteint la lumière en appuyant sur l'interrupteur. Mais heureusement, après, son sourire se rallumait tout seul et il chantait « Le Lundi au soleil » ou « Alexandrie, Alexandra » en dansant un peu mais pas trop parce qu'il ne savait pas danser comme Claude François à la télé.
Les grenouilles, il les perçait avec un bâton. C'était des tiges de noisetiers qu'il taillait avec le couteau que son papa lui avait offert avant qu'il soit mort. A chaque fois qu'il les taillait, il pensait à son papa. Il lui avait dit : « Avec ça, Paul, tu seras un homme et il ne pourra rien t'arriver. Tu pourras aller au bout du monde, il ne pourra rien t'arriver ! » ça lui avait fait drôlement plaisir à Paul. Il ne savait pas très bien pourquoi, mais ça lui avait fait drôlement plaisir. Il n'avait pas très envie d'aller au bout du monde parce que ça avait l'air d'être loin quand même, mais le simple fait de savoir qu'il pouvait y aller quand il voulait, ça lui suffisait pour être content.
Il mettait deux ou trois grenouilles sur la tige, elles avaient l'air bizarre, les pattes écartées comme ça, ça lui faisait penser aux joueurs de foot empalés sur leurs tiges de fer dans le baby foot du bar tabac. Il aurait bien aimé y jouer mais les autres, ils lui disaient : non, toi t'es nul ! Parfois dans sa tête pleine d'idées, il imaginait qu'il faisait cuire les joueurs de foot à la place de ses grenouilles, avec la peinture bleu et rouge qui se craquelait au-dessus du feu et les joueurs qui se tordaient dans les flammes. Bon, il savait bien qu'il n'étaient pas vivants mais c'était plus marrant de l'imaginer comme ça. Ou alors il imaginait le contraire : les joueurs en fer dans le bar tabac étaient devenus des grenouilles et pour taper dans la balle avec une grenouille toute glissante, amuse-toi, ça leur aurait fait bien les pieds à la bande à Gaëtan. Gaëtan, c'était le chef ! Il n'aurait pas aimé être chef, Paul. Fallait tout le temps faire semblant d'être le plus fort. Ça devait être drôlement fatiguant. A part peut-être pour sentir le goût des lèvres de Camille. C'était l'avantage quand t'étais chef, tu pouvais embrasser Camille. Parce que les Camille elles n'embrassent que les chefs.
Tant pis. Mais Camille, un jour, il lui avait montré comment attraper les grenouilles, et ça, Gaëtan, tout chef qu'il était, il avait jamais su le faire. Elle lui avait dit : « ouah, c'est incroyable comme t'es rapide ! » et il avait senti des picotements entre ses jambes, là où il y a le zizi et du plaisir tout rouge sur ses joues.
Les grenouilles, il fallait faire bien attention à ne pas trop les faire cuire. Le feu, il le faisait dans un cercle de pierres, comme son papa lui avait appris. Il mettait toutes les petites branches sèches en « tipi » et quand ça avait bien pris, il rajoutait quelques branches plus grosses pour faire les braises. Il adorait regarder les flammes, on savait jamais quelles couleurs exactes elles avaient. Ça se mélangeait toujours. Et puis elles étaient insaisissables à toujours danser comme ça ! Un peu comme la Vérité.
Il ne l'avait pas beaucoup cherché ces temps-ci et il s'en voulait un peu. Il ne se trouvait pas très courageux. Il avait bien trouvé une douille d'obus toute rouillée mais il savait ce que c'était une douille même si, au début, comme elle était toute remplie de terre, il ne s'en était pas aperçu toute de suite. Il avait eu une seconde où il avait bien cru L'avoir trouvée.
Un autre jour, il avait trouvé une corne de vache. Ça c'était sacrément rare. C'était la pièce maîtresse de son trésor. Son trésor était caché dans le coffre de la vieille deux-chevaux qui pourrissait dans la grange de la ferme à côté de chez lui. Y'avait aussi l'élastique qui avait maintenu les cheveux de Camille. Il l'avait aidé à le chercher en fermant très fort sa main dessus et en n'arrêtant pas de se dire que c'était très mal ce qu'il faisait mais tant pis. Au tout début, il y avait encore son odeur à Camille sur l'élastique et il avait arrêté de chasser les grenouilles, arrêté de chanter, arrêté de sourire. Il ne faisait que respirer Camille, à s'en faire mal au nez.
Quand les grenouilles étaient grillées à point, il les retirait de dessus le feu et il les mangeait.
Il n'avait jamais rien mangé de meilleur que ça. Ça lui faisait un truc sur la langue, dans le palais, le grillé, le tendre, tout ça mélangé, c'était un drôle de plaisir. Et y avait plus qu'à écouter les oiseaux en même temps et tout était bien.
Aujourd'hui, il faisait bien chaud en plus. Il sentait toute l'eau des bois qui remontait. Il était dans un bain de vapeur et d'odeur de bois et il aimait drôlement ça.
Il avait d'abord vu Camille de très loin et puis il l'avait entendue. C'était pas possible de pas faire de bruit dans les bois. Elle arrivait derrière lui et il entendait bien qu'elle marchait comme quand on ne veut pas faire de bruit, « à pas de loup ». Même un loup, il fait du bruit dans un bois. Elle croyait quoi Camille ? Qu'il était sourd ? Il était comme une statue. Elle venait pour les grenouilles. Sûr. Rien que pour les grenouilles. Pour qu'il lui apprenne encore. Fallait pas qu'il imagine autre chose.
 C'est qui ?
Ses mains sur ses yeux, un peu chaudes, avec tous ses doigts fins, c'était aussi bon que de manger des grenouilles.
 Camille
 Tu m'as reconnu ?
Bien sûr qu'il l'avait reconnu. Même s'il l'avait pas vu, il l'aurait reconnu. Sa voix il 'avait dans sa tête autant que celle de Claude François.
Après ils avaient chassé des grenouilles, jusque très tard le soir. Trop tard. D'ailleurs depuis un moment ils ne chassaient plus de grenouilles. Ils étaient sur son « tronc » et ils regardaient les tapis de primevères sans rien dire. Paul avait drôlement chaud. Il aurait fallu rentrer depuis longtemps, il le savait bien. Pourquoi elle restait comme ça, à côté de lui, avec sa robe et ses égratignures de ronces sur les jambes. Il les aurait bien léché pour que ça fasse doux dessus, comme il faisait pour ses bras à lui parfois. Il avait des drôles d'idées dans la tête tout à coup. Il n'aimait pas trop ça. Il pensait : si j'étais un chef comme Gaëtan, peut-être que...mais il ne voulait pas laisser la pensée sortir parce que après ça peut faire mal, il valait mieux aller chercher la Vérité.
Alors, il dit qu'il fallait rentrer, qu'il était tard et il se leva et Camille se leva aussi et elle était juste en face de lui, si près qu'il pouvait sentir comme sur l'élastique. Alors, il lui dit que l'élastique, c'était lui, qu'il lui avait volé et qu'il avait fait semblant de chercher avec elle. Et Camille a eu un grand sourire qui prenait tout son visage. Et son visage, il arrêtait pas de se rapprocher de celui de Paul, tout doucement, comme dans les films. Et il savait ce qu'elle allait faire et tout ce qu'il avait su jusque là, il ne le savait plus tout d'un coup. La couleur des fleurs, le soir qui tombe et même le goût des grenouilles, il ne savait pas si ça existait vraiment. Et les lèvres de Camille se sont posées sur les siennes. Et ça a fait un truc qu'il ne connaissait pas dans sa tête et dans tout son corps.
Et Paul se dit : ça y est, je L'ai trouvée. J'ai trouvé la Vérité.





dimanche 9 novembre 2008

Genèse

Voilà ! L'histoire de cet endroit est simple. Je vagabondais sur la toile lorsque je suis tombé sur un blog, dont je tairais le nom. Une première fois. Je m'arrêtai. Je lus. J'étais troublé. Pas plus. Je voulus mettre un petit mot. Je ne trouvai pas où laisser un message. J'abandonnai. Pas grave. Quelques mois plus tard, je retombai sur ce blog. Nouvelle sensation bizarre. Un peu comme quand on croise un regard dans une soirée et qu'on se dit : je ne dois pas partir avant de lui avoir parlé. La plupart du temps, c'est une fausse alerte. Mais au moins, on a vérifié, pour ne pas se charger d'un petit regret supplémentaire. Mis bout à bout, ça peut faire des cancers ces trucs-là ! Faut se méfier. Donc, je cherchai un peu mieux une manière de communiquer. Totalement ignare en matière de blog, je secouai le machin dans tous les sens pour comprendre le mécanisme. Las. Impossible de trouver le moyen de rentrer en contact. Attiré vers d'autres rivages, j'abandonnai de nouveau...avec un petit goût d'inachevé dans la bouche. Et puis, hier, je retombe dessus. Là, je me dis : cette fois-ci est une de trop. Je ne repartirai pas de là sans lui avoir parlé. Lui dire que je suis touché sans trop savoir pourquoi. Que ce n'est pas si courant...dans la vie, comme ici. Que je dois vérifier si ça vaut le coup qu'on se parle ou non. Tout ça.
J'ai re-secoué le machin. Je l'ai bien examiné. Pas de porte d'entrée. J'essaie toutes le manips. Le machin résiste. L'angoisse monte avec la conscience de n'avoir pas les bons outils et d'être un parfait ignorant dans ces sortes de manipulations. J'ai dit que j'irai au bout. J'irai au bout. Donc, je crée ce blog, me disant qu'il doit y avoir un moyen de parler de blog à blog. Le blog est créé. ça ne m'avance pas plus. Zut et re-zut ! C'est énervant ! Je me lance difficilement dans la blogosphère : au moment de l'inscription, on me demande mon URL, excusez-moi vous entendez quoi exactement par URL ? Google me répond aimablement. J'y arrive enfin. Le temps de m'accoutumer aux lieux, je vois : Chat ! Alléluia ! Il y aura bien une bonne âme pour éclairer ma lanterne. Il y en eût trois. Que je remercie encore. Mais où sont ces gens si serviables dans la vie de tous les jours ? Et là, en trois, quatre échange, le problème a été résolu , créant mon émerveillement, comme le béotien face au mécanicien. On m'a dit : tu vois la fin du message sur le blog. Oui, ça je vois / Tu cliques dessus / dessus quoi ? / Sur le mot en gris à la fin / Ah oui / Et voilà, c'est tout, t'as plus qu'à laisser ton commentaire / Ah oui, je vois, merci.
C'était que ça !!? Evidemment, à chaque fois, c'est la même chose ! Il faut penser simple. M'étonne pas que je n'ai pas trouvé !
Et voilà je me retrouve avec un blog sur les bras. Pour quoi ? Juste pour laisser un commentaire sur un autre blog !
Puisque j'hérite d'un espace tout neuf et parfaitement vierge, je vais commencer à le souiller un peu...on verra si je me prends au jeu. Mais c'est un jeu bizarre : exhibitionnisme, voyeurisme...Ou simplement la possibilité de s'exprimer un peu anonymement, donc un peu librement en se disant que même si une personne nous lit, nous écrivons pour cette personne-là. Ce n'est donc pas tout à fait vain.
Bonne journée à vous !

Le gris s'installe dans le ciel,
prend ses aises
sagouin impertinent
Le soleil trop timide
a laissé sa place
Le ciel s'en fout !